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Je me suis réveillé en colère
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Librairie Eyrolles - Paris 5e
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Je me suis réveillé en colère

Je me suis réveillé en colère

Marek Halter

198 pages, parution le 19/10/2007

Résumé

"Vous avez l'air bien en colère !"

C'est en ces termes qu'un matin, place des Vosges à Paris, un vieux Juif religieux interpelle Marek Halter. Le dialogue se noue naturellement entre les deux hommes. Bientôt, l'habitude est prise. Chaque jour, Marek Halter vient trouver le vieux Juif devant la statue du roi Louis XIII pour partager avec lui un nouvel objet de courroux.

Communautarisme, racisme, écologie, religion, démocratie, altermondialisme, conflit israëlo-palestinien... Qu'il s'emporte ou s'enthousiasme, Marek Halter enrichit le débat de références bibliques, historiques et philosophiques, et met ses dons de conteur au service des grandes causes. Un livre à la fois actuel et intemporel.

Après le très grand succès de ses biographies de femmes bibliques - Sarah, Tsippora, Lilah et Marie -, Marek Halter change de registre. Je me suis réveillé en colère est un livre de combat.

L'auteur - Marek Halter

Marek Halter est notamment l'auteur des trilogies "La Bible au féminin", "Les Femmes de l'islam" et de Marie. Son dernier roman, Ève, est paru 2016 aux Éditions Robert Laffont.

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Sommaire

De la démocratie en Russie

–; Vous savez, les hommes sont si bêtes qu'une violence répétée finit par leur paraître un droit.
–; Elle me plaît cette phrase, dit l'étranger. Il faudrait l'imprimer sur des tracts et les lâcher au-dessus du Soudan, de l'Irak, de la Russie...
–; Pourquoi de la Russie ?
–; Ah, c'est vrai, la Russie vous la connaissez bien et vous n'aimez pas qu'on la critique !
–; La critique dépouille l'arbre de ses chenilles mais aussi de ses fleurs. Ce n'est pas la critique qui me met en colère, mais l'ignorance. En 1988, quand Mikhaïl Gorbatchev ouvrait enfin la Russie au monde, comment avons-nous réagi ? En 1991, Boris Eltsine, par un coup d'éclat, faisait disparaître l'Union soviétique, ce monstre qui a pesé sur le monde pendant soixante-quinze ans. J'ai vu arriver à Moscou des hommes politiques, des économistes, des financiers et des marchands de tous genres et de toutes nationalités. Ils s'entassaient dans des hôtels aux couloirs interminables gardés par de drôles de babouchkas à chaque étage. Que venaient-ils faire ? Aider le peuple russe à affronter un monde nouveau, de nouvelles règles ? Ou profiter des restes de l'Empire et participer au dépeçage ? Aujourd'hui, on charge " l'ancien KGBiste " Poutine et son équipe de toutes les dérives du pouvoir moscovite. On en appelle même au penchant autoritaire des Russes. Comment pourrais-je rester calme en écoutant de telles sornettes ? Si je connais mal cette Afrique qui me fascine, la Russie, en revanche, je la connais bien. J'y ai vécu. Plus que cela : pendant la guerre, elle m'a sauvé la vie, et celle de bien d'autres. Avons-nous seulement réfléchi au sort de l'Europe ? Que serait-elle devenue si la Russie n'avait pas gagné la bataille de Stalingrad ? Vingt-sept millions de Russes sont morts pour notre liberté... et pour la leur. Combien d'entre nous auraient survécu sans cet inimaginable sacrifice ? Quand je pense qu'en Estonie, qui fait aujourd'hui partie de l'Europe, le gouvernement a décidé de détruire un monument à la mémoire des soldats soviétiques morts dans la lutte contre le nazisme parce que, après la guerre, l'Union soviétique a occupé son territoire, je deviens fou de rage.
–; Vous allez souvent en Russie ?
–; Oui, j'y dirige deux universités françaises, à Moscou et Saint-Pétersbourg. C'est de Moscou que j'ai pris l'avion pour Cracovie afin de participer à la célébration du soixantième anniversaire de la libération des camps nazis. Dans l'avion, j'ai croisé un petit vieux à la chevelure blanche et à la poitrine bardée de médailles : Ilya Ravtchenko. Il fut le premier soldat soviétique à découvrir Auschwitz : " Le maréchal Koniev nous a envoyés repérer le chemin le plus court pour gagner la Silésie. Nous sommes partis à cheval. Il neigeait. Soudain, nous avons vu le camp... " Il parlait avec émotion, comme si l'événement s'était produit la veille. Fut-il l'un de ces quatre cavaliers que Primo Levi, derrière les barbelés, vit s'avancer dans le brouillard de neige, le 27 janvier 1945 ? Peut-être. Il est sûr en tout cas que ceux-là étaient des Russes. Vous devez comprendre : quand je parle de la Russie, je ne défends ni les goulags ni les assassins des écrivains et des artistes juifs...
–; Comment expliquez-vous ce mépris dont est victime la Russie aujourd'hui ? me demande l'inconnu. Le goulag a disparu et les Juifs n'y sont plus molestés.
–; Bonne question. Mépris et fascination ont, depuis toujours, marqué les rapports des Français aux Russes et à la Russie. Diderot, grand admirateur de Catherine II, se plaisait à dire par ailleurs que les Russes étaient " pourris avant d'être mûrs ". Mme de Staël, qui avait fuit en Russie la colère de Bonaparte, n'hésitait pas à traiter ses hôtes de barbares. Le marquis Astolphe de Custine consacra des milliers de pages à ce vaste pays auquel il était si attaché, mais il mettait tous les Russes dans le même sac : " Rien n'est précis dans la bouche d'un Russe, nulle promesse n'en sort, ni bien définie, ni bien garantie. [...] Sa bourse gagne toujours quelque chose à l'incertitude de son langage. " Quant à Honoré de Balzac qui, amoureux de Mme Hanska, s'aventura jusqu'à Kiev, il définit la Russie en deux mots sans appel : " Obéissance et violence ".
Il en va ainsi encore aujourd'hui. Rien dans ce pays – qui persiste à aimer la France malgré notre condescendance et le souvenir des ravages causés par les troupes napoléoniennes – ne serait assez bon, assez juste ou assez grand à nos yeux. Son évolution postcommuniste n'irait pas dans la bonne direction et, qui plus est, ne serait pas assez rapide.
En 1984, avec Slava Rostropovitch, nous avons organisé une manifestation pour la libération d'Andrei Sakharov. La fin de l'empire communiste et du goulag n'a pas vingt ans ! Et nous boudons ce pays parce qu'il n'est pas aussi démocratique que le nôtre ?
La Russie n'a jamais connu la démocratie. Je pose une question : les nations ont-elles le droit, comme les individus, à une convalescence après une longue maladie ? Combien de temps cette convalescence peut-elle durer ? La réponse, comme d'habitude, est venue des médecins. Ils étaient nombreux accourus de l'Ouest, au chevet du malade. Tous s'accordaient à lui prescrire la démocratie mais divergeaient sur les moyens à employer pour l'atteindre. De nombreux experts arrivèrent aussitôt, des Allemands, des Scandinaves, des Italiens... Les Américains, les libéraux autour de Milton Frydman, préconisaient le passage brutal à l'économie de marché. Il fallait, disaient-ils, dégager l'État du patrimoine industriel de la Russie et " dollariser " l'économie. Ces Américains n'apportaient pas seulement des conseils, ils apportaient aussi de l'argent : un prêt du FMI en soutien au programme de privatisation, quatre-vingt-dix millions de dollars. Les seules consultations de l'un des experts-conseillers de Boris Eltsine, Jeffrey Sachs, professeur d'économie à l'université de Harvard, coûta au pays quarante millions de dollars ! Les Français brillèrent par leur absence. Seul Robert Badinter vint plaider pour l'instauration d'un État de droit.
Plus récemment, il a suffi que Vladimir Poutine évoque la " dictature de la loi " pour que l'on s'en alarme. Pensez donc : la dictature ! Nous étions moins regardant lorsqu'il s'agissait de la dictature du prolétariat...
Ah, ces médecins ! Ils se préoccupent de la maladie mais s'intéressent rarement aux malades. Pensez à la rencontre de Catherine II et de Diderot telle que la raconte magnifiquement le comte de Ségur. Devant la tsarine et ses ministres, le grand encyclopédiste présente son projet de réforme pour la Russie. Catherine applaudit : " Je vous félicite, cher Denis Diderot, pour votre merveilleux exposé. Je vous remercie aussi pour vos conseils. À cela près que vous êtes un homme heureux car vous écrivez sur le papier qui, lui, supporte tout. Tandis que moi, pauvre tsarine, j'écris sur la peau humaine, qui est beaucoup plus sensible. "
–; Et la Tchétchénie ?
–; En effet, reste la guerre de Tchétchénie. Que les Tchétchènes eux-mêmes aient provoqué cette seconde guerre du Caucase – des fondamentalistes qui avaient envahi le Daghestan, territoire russe, en proclamant une république islamiste – ne change rien à l'affaire : un État de droit ne peut écraser sous les bombes une population, fût-elle rebelle.
Je me suis souvent demandé pourquoi chez nous, en France, on se montrait si agressif envers la Russie. Cela ne remonte pas à la guerre de Tchétchénie mais bien au-delà. Est-ce le décalage entre l'idée que nous nous faisons de la Russie et sa réalité ? En Chine, nous savons d'avance que nous nous heurtons à une civilisation radicalement différente de la nôtre. Tout comme en Afrique. Le problème vient de ce que nous considérons la Russie comme un reflet de nous-mêmes. Tolstoï – qui écrivait souvent en français –, Dostoïevski et Tchekhov n'appartiennent-ils pas à notre culture ? Tchaïkovski et Stravinsky, à notre patrimoine musical ? Kandinsky et Malevitch ne font-ils pas partie de notre avant-garde picturale ? Comme Nijinski et Diaghilev de notre danse moderne ?
Aussi, quand nous nous rendons en Russie, sommes-nous persuadés d'y trouver des hommes et des femmes qui parlent comme nous, vivent comme nous, bref, des Français. Or nous rencontrons des Russes. Même Alexandre Dumas en fut quelque peu perturbé : " La langue russe n'a pas de gamme ascendante ni descendante. Quand on n'est pas brat, c'est-à-dire frère, on est dourak, idiot ; quand on n'est pas galoubtchik, petit pigeon, on est soukin sin, fils de pute... "
Nous n'aimions ni la Russie des Tsars ni celle des Soviets, même si nos grands poètes, Eluard et Aragon, chantèrent ses louanges. Aujourd'hui, nous n'aimons pas plus la Russie libérale. Trop libérale ?
Poutine, qui veut nous faire croire par le choix de ses lectures – Balzac et Dumas – qu'il aurait pu être français, ne serait en réalité, horrible découverte, qu'un vilain KGBiste.
–; Justement, Poutine n'a-t-il pas fait tuer des journalistes ?
–; Vous me faites penser à mon voisin Jack Lang. Chaque fois que nous nous croisons, il me lance : " Alors, comment va ton ami Poutine ? "
–; Et que lui répondez-vous ?
–; Qu'il est comme tous les hommes au pouvoir. Je lui ai raconté ma première visite à son bureau du Kremlin. En pleine conversation, je me lève et j'ouvre la fenêtre. Surpris, Poutine me demande : " Que faites-vous ? " Je lui réponds : " Par curiosité, j'ai voulu voir ce que vous voyez, vous, Vladimir Vladimirovitch, en ouvrant votre fenêtre. " Sans quitter son siège, il me répond en riant : " Je vois le mur. " " Voilà votre problème ! " Il réplique : " Tous les hommes politiques voient le mur quand ils ouvrent la fenêtre. "

Les Russes aiment autant la liberté que nous. La lutte des dissidents contre la dictature soviétique, à laquelle j'ai participé autant que j'ai pu, l'explosion de joie à la chute du communisme, le prouvent. Mais il faut comprendre que cette fameuse orange dont parlait Andreï Sakharov, en Russie, sera russe. Plus nous attaquerons les Russes, plus ils auront l'impression qu'on ne les respecte pas : orgueilleux, ils se replieront sur eux-mêmes.
Les Russes, m'a dit un jour mon ami Jacques Sapir, ont inventé la notion de " démocratie souveraine ", c'est-à-dire nationale. Elle peut ne pas nous plaire. Mais nous n'avons fait aucun effort pour leur expliquer et leur montrer en toute amitié les bienfaits de cette autre démocratie, celle à laquelle nous tenons : la démocratie solidaire.


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Caractéristiques techniques

  PAPIER NUMERIQUE
Éditeur(s) Robert Laffont
Auteur(s) Marek Halter
Parution 19/10/2007 08/09/2011
Nb. de pages 198 -
Format 14 x 22 -
Couverture Broché -
Poids 234g -
Intérieur Noir et Blanc -
Contenu - ePub
EAN13 9782221109960 9782221119310
ISBN13 978-2-221-10996-0 -

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