Résumé
Le 22 janvier 1933, Méheut est invité à la Ciotat pour lelancement du paquebot Président-Doumer. Il adresse alors à sa collaboratriceYvonne Jean- Haffen cinq croquis à la gouache qui constituent une petitechronique en images de l'événement (Dinan, musée de la Grande Vigne). En 2020,une autre oeuvre en lien, plus grande et plus aboutie, est acquise par le muséeMathurin Méheut. Cette gouache, remarquable par ses qualités decomposition et son chromatisme, sera présentée pour la première fois au publicdans le nouveau musée. A cette occasion, l'exposition d'inauguration seraconsacrée aux paquebots, en hommage à ces machines géantes que Méheut areprésentées, décorées, et sur lesquelles il a aussi voyagé. Entre 1923 et 1950,Méheut réalise des travaux de décors et d'illustrations pour une vingtaine depaquebots des deux grandes compagnies maritimes françaises : les MessageriesMaritimes (lignes du Moyen et de l'Extrême-Orient, des océans Indien etPacifique) et la Compagnie générale transatlantique. Outre laréalisation de décors, Méheut collabore de diverses manières avec les compagniesmaritimes. En 1927, il participe à l'Album édité par les Messageries Maritimes àl'occasion du 75e anniversaire de la compagnie et réalise plusieurs études surle thème de la licorne, son emblème. En 1928, il crée le carton pour la mosaïqueau sol du hall de l'hôtel des Messageries Maritimes à Paris, réalisée par Gentil& Bourdet. Enfin, Méheut travaille à des illustrations destinées auxcartes-menus ainsi qu'aux plaquettes et brochures publicitaires des deuxcompagnies. La composition du Président-Doumer est très originale auregard de son sujet principal, le paquebot. Dans un format panoramique, Méheutdéploie l'imposante masse rouge minium au second plan. Cette coque encore viergede tout équipement apparaît, statique, comme coincée entre les rochers de laCiotat et le quai où des pêcheurs s'activent dans la plus totaleindifférence. Dans cette représentation, Méheut laisse de côté cequi est mis en avant dans l'iconographie habituelle du paquebot : la majesté, legigantisme, le modernisme, la puissance conquérante et l'imaginaire du voyage,le tout servi par des compositions dynamiques. Dans ses croquisréalisés en tant que passager à bord de l'Ile-de-France, Méheut préfères'arrêter sur des scènes anecdotiques plutôt que sur les très chics voyageurs,ou sur le détail d'un hublot plutôt que sur le cadre somptueux des premièresclasses. La singularité de son regard sur la vie à bord se mesure àl'aune des images, très mises en scène, données par la photographie et lesdessins promotionnels de l'époque. Ce ne sont pas tant le luxe, l'élégance etl'art de vivre qui intéressent Méheut que des petits instants de vie saisis à lavolée.