Résumé
Au cœur de chaque photographie se trouve un souvenir, et dans chaque souvenir, un murmure de résis-
tance. Lost est un soulèvement silencieux, un testament fait d'ombres et de lumières, de chagrin et de grâce.
Produit, imprimé et distribué au Myanmar, Lost est un acte de défi subtil mais profond dans un pays où s'ex-
primer ouvertement contre le régime militaire reste une dangereuse impossibilité.
À la suite du coup d'État militaire de février 2021, le Myanmar s'est enfoncé dans une protestation bruyante,
une répression violente et le silence. Les protestations ont été étouffées, les voix ont été écrasées et un
silence effrayant a recouvert le pays. Face à cette violence et à cette répression systémiques, la dissidence
ouverte est devenue une proposition périlleuse. C'est dans ce contexte que Lost voit le jour, une publication
qui ose parler par symboles, pleurer par métaphores et porter le flambeau du souvenir grâce à des archives
soigneusement sélectionnées.
Au fond, Lost est un livre sur la mort, mais pas seulement au sens propre. Il traite de la perte de la démo-
cratie, de l'érosion de la liberté et du déchirement d'un pays qui doit à nouveau faire son deuil. Mais c'est
aussi un livre sur la persistance de la culture, l'endurance de la foi et le pouvoir de la mémoire collective. À
travers des photographies de funérailles tirées des archives photographiques du Myanmar - un vaste dépôt
d'images vernaculaires couvrant plusieurs générations -, Lost médite sur les rituels de deuil et les nom-
breuses formes d'adieu pratiquées par les diverses communautés du Myanmar.
Ces photographies, calmes et saisissantes, appartiennent à un langage visuel profondément enraciné dans
la vie culturelle du Myanmar. Elles décrivent les funérailles non pas comme des événements isolés, mais
comme des expressions communautaires vitales. Les scènes sont profondément intimes, mais ont une ré-
sonance universelle : familles réunies autour d'un corps, couronnes et bougies disposées avec soin, calme
d'une dernière étreinte. Elles proviennent de contextes bouddhistes, chrétiens, musulmans, hindous et ani-
mistes, reflétant le pluralisme qui définit le tissu historique du Myanmar.
Mais le cœur de Lost se trouve dans sa deuxième couche, le mot écrit. Une série de notices nécrologiques
s'entremêlent à ces images. Il ne s'agit pas de documents au sens classique du terme, mais de récits fictifs
inspirés par la vie et les luttes de ceux qui ont résisté au régime militaire dans les mois qui ont suivi le coup
d'État de 2021. Les noms et les âges sont réels. Ils appartiennent à ceux qui sont tombés au combat. Les
mots, bien qu'imaginés, résonnent d'une vérité qu'aucun censeur ne peut supprimer.
Chaque notice nécrologique porte le poids d'une vie écourtée, d'une histoire qui n'a jamais été entièrement
racontée. Elles parlent de fils et de filles, de voisins et d'enseignants, de poètes et de manifestants. Elles
parlent d'espoir et de courage, de rêves différés, de la ténacité de ceux qui se sont levés pour défendre la
liberté.