La France, une République de mandarins ? Les hauts fonctionnaires et la politique

La France, marquée par une tradition centralisatrice soulignée déjà par Tocqueville, constituerait-elle une "exception " dans l'Europe d'aujourd'hui ? Un fait frappe l'observateur : les rapports très étroits que les hauts fonctionnaires entretiennent avec l'engagement politique. On découvre un double processus : la politisation des emplois administratifs ; la colonisation des lieux du pouvoir par les membres des grands corps d'Etat. D'un côté, dans les cabinets ministériels et à la tête des administrations centrales, les " grands commis " neutres et loyaux reculent devant les militants. De l'autre, les énarques gagnent du terrain dans les gouvernements et les assemblées. Cette interpénétration politico-administrative, en contradiction totale avec l'éthique du service public, a atteint un niveau si élevé sous la Cinquième République qu'il n'est pas exagéré de qualifier ce régime de " République de mandarins". Les fonctionnaires doivent-ils faire de la politique ? Quelle est l'ampleur de cette interpénétration ? Quels sont les facteurs qui, dans les institutions politiques, le statut de la fonction publique, la formation dispensée à l'ENA et la crise de l'Etat-nation, jouent en sa faveur ? Les alternances et les cohabitations ont-elles influencé son rythme et ses modalités ? Quelles sont ses conséquences sur la démocratie, la gouvernabilité, mais aussi le fonctionnement de l'administration ? Existe-t-il des mesures capables de rendre l'Etat plus impartial et le personnel politique socialement moins homogène ?