
Résumé
Après l'extraordinaire succès international de Écoute-moi, traduit dans quinze pays et lauréat du Premio Strega 2002, le Goncourt italien, les Éditions Robert Laffont publient aujourd'hui le premier roman de Margaret Mazzantini. C'est au milieu d'une église vide, un petit matin d'hiver, face au corps sans vie d'Antenora, sa grand-mère, que l'auteure remonte le cours du temps sur trois générations, évoquant comme dans un rêve une mosaïque de souvenirs et d'émotions... Les personnages de sa famille surgissent par touches impressionnistes, une succession d'anecdotes tendres et cruelles : Monda, l'arrière-grand-mère, irresponsable et frivole, qui cache un chagrin d'amour brûlant ; Antenora, femme forte enserrée dans ses liens d'épouse, de sœur et de mère prisonnière d'un monde archaïque et machiste, qui tente de préserver sa liberté intérieure...
L'histoire d'Antenora est aussi celle d'un siècle qui la confrontera à des expériences décisives : la guerre, le fascisme et la déroute d'après-guerre. Des épreuves douloureuses et répétées : un enfant emporté trop tôt par la maladie, le départ de ses fils au combat, les derniers instants de la vie conjugale, la solitude nouvelle. Et parmi elles, la course éperdue à travers Rome, qu'elle entreprend la nuit, pour tenter de retrouver l'un de ses garçons parti s'engager, après la capitulation de 1943, dans l'ultime carré fasciste - la république de Salò.
À travers ces destins, se dévoile ainsi un monde finissant, celui d'une génération vaincue. Mais le poids du passé doit-il toujours nous contraindre à nous inscrire dans une histoire jouée d'avance ?
Sommaire
Le 25 juillet, la radio annonça la chute de Mussolini. Dans la rue résonnait la joie des autres. Tant d'autres ! Si nombreux ? Défaitistes. Et où étaient-ils auparavant ? Elle avait toujours eu le sentiment d'un soutien unanime, sans faille. Où étaient-ils cachés, tous ces subversifs ? " Pauvres de nous, pauvres de nous... " marmonnait-elle angoissée, dans un coin, le visage trempé de sueur et de larmes. Même les yeux noisette du nigaud toscan semblaient vagues, tièdes et humides : " Qu'allons-nous devenir ? Et les enfants ? Que vont devenir les enfants ? Pour qui se battront-ils ? "
Leurs pensées allèrent au plus jeune. Que lui raconteraient-ils à présent ? Qu'ils étaient du mauvais côté ? Le temps des boucles dorées était fini. Vittorio avait seize ans, une tête noire, ébouriffée, deux yeux inquiets, arrachés aux orbites de sa mère. Il attendait de ses parents un geste résolu. Mais ils fuyaient l'exigence de ce regard, en essayant de lui communiquer leur peine : devenus vieux du jour au lendemain, ils voulaient seulement qu'on les laisse tranquilles. Le fils s'enfonçait dans un abîme de solitude : le Duce arrêté, il baignait dans la merde que son père, honnête citoyen monarchiste et fasciste, faisait dans son pantalon. C'est la peur qu'il reniflait dans la maison qui le dégoûtait, non les cris de joie qui parvenaient du dehors. Au contraire, un coup d'œil par la fenêtre et il descendait dans la rue. Il les voulait toutes pour lui, les injures des gens.
Cet été-là, leur fils s'éloigna d'eux définitivement. Il était toujours dehors, et vivait dans la maison barricadé derrière son caractère ombrageux, presque menaçant. Le soir, dès qu'il tournait la clé dans la serrure, accueilli par la puanteur de moisi de ces deux vieux assis autour de la table, il avait envie de se précipiter à nouveau dans les escaliers pour ne plus jamais revenir. Il lui semblait qu'ils l'attendaient là pour guetter en silence ses intentions, tout en aspirant leur soupe avec la cuillère.
Grand-mère débarrassait la table en accomplissant chaque geste avec une fixité souffrante dont rien ne pouvait la distraire. Ses cheveux gris tombaient sur son visage. Dans les assiettes, le bouillon habituel laissait toujours la même couche de graisse. Elle les oubliait dans l'évier et allait se coucher. Elle ne se déshabillait même pas. Elle s'allongeait sur le lit, et ses seins vides retombaient sur le côté. C'était son corps, et elle ne savait qu'en faire. Près d'elle, un autre sommeil simulé : celui du nigaud toscan. Même au milieu de la nuit, sans s'en apercevoir, elle se redressait et restait assise dans le lit à réfléchir. Son mari ne parvenait pas à la laisser tranquille.
" Chérie... Tu ne dors pas ?
–; Si, si, je dors, je dors... "
Ils n'en parlaient pas, ils n'en avaient que trop parlé. Ils avaient pris pitié d'eux-mêmes, de leurs pauvres conjectures. Ils partageaient la culpabilité et avaient progressivement choisi le silence, seulement interrompu par le laconisme des petites affaires quotidiennes.
Caractéristiques techniques
PAPIER | |
Éditeur(s) | Robert Laffont |
Auteur(s) | Margaret Mazzantini |
Collection | Pavillons |
Parution | 12/04/2007 |
Nb. de pages | 170 |
Format | 13.6 x 21.6 |
Couverture | Broché |
Poids | 220g |
EAN13 | 9782221103555 |
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