Le corps maternel en philosophie

Cet essai original invite à revisiter l'histoire de la philosophie à travers les siècles en interrogeant la relation des philosophes au corps maternel. C'est la première fois qu'une investigation aussi large et complète est menée sur un tel sujet. De Platon chez qui elle décrypte les prémisses d'un effacement du corps, à Aristote qui inaugure la tradition de l'infériorisation des femmes due à leur matrice; du christianisme, dont elle se demande si la figure de la Vierge Marie prolonge le refoulement du corps maternel ou si elle en amorce une reconnaissance symbolique, à la libéralisation du corps aux XVIIe et XVIIIe siècle jusqu'au meurtre matricide chez Sade; du corps-sans-organes de Deleuze et Guattari, à la Khôra errante comme l'utérus des femmes de Derrida, l'autrice démontre que depuis les débuts de la pensée occidentale les femmes n'ont cessé d'être privées de leur lieu propre. Les choses changent avec le Mouvement de libération des femmes, lorsque l'espace ontologique du corps maternel commence à être pensé par les femmes elles-mêmes, avec Antoinette Fouque qui voit dans le corps procréateur des femmes le lieu de l'hospitalité charnelle et le paradigme de l'éthique, Luce Irigaray qui analyse elle aussi le matricide à l'origine de la tradition philosophique, Luisa Muraro qui pense le rapport à « l'ordre symbolique de la mère » ou encore Carol Gilligan et le Care. Mais n'assiste-t-on pas, avec l'invention des théories queer et cyborg, ainsi qu'avec les avancées des biotechnologies à un geste ultime pour « exproprier » les femmes d'elles-mêmes, effacer définitivement le corps maternel et plus largement le corps ? Telles sont les questions majeures qu'aborde ce passionnant essai.