Le goût de la viande

4e de couverture
Hyacinthe Kergoulé, jeune appelé de vingt ans, survit miraculeusement à l'enfer des tranchées. Lorsqu'il
regagne la ferme familiale, à l'armistice, c'est avec un bras en moins, mais un truc en plus, dans la tête, ou au
fond des tripes. Que lui reste-t-il à vivre ?
L'histoire de Hyacinthe Kergoulé est celle d'un homme qui tente de se reconstruire malgré lui, bouchée après
bouchée, en redevenant carnivore.

Ce roman produit une commotion physique au sens propre, tant le trouble est puissant. Impossible au
lecteur de rester tiède, sur le seuil, à distance, il faut s'engager tout entier dans cette aventure hallucinée dont
on ne sort pas indemne. Une littérature sensorielle aussi (on songe au Parfum de Suskind), d'une précision
clinique, grande puissance évocatrice.
Le personnage de Hyacinthe Kergoulé tient tout le livre, écrit à la première personne. Nous vivons le
« voyage au bout de la nuit » de ce bonhomme, non pas à travers la grande guerre, mais dans l'espace qui
s'ouvre au retour de cet enfer. Hyacinthe est difficile à cerner. Est-il un survivant ? Il revient du front, mais
semble y avoir laissé sa morale, ses émotions, sa conscience. A-t-il encore du désir ? Seuls le voisinage de la
mort, l'attraction du saccage semblent l'animer à l'occasion d'événements imprévisibles. En « suspens » des
autres et de la vie, Hyacinthe est opportuniste, animé d'une pulsion de vie animale qui le conduit à
entreprendre avec une égalité d'humeur des choses banales ou folles - un mariage, une entreprise de
cercueils, la collaboration avec les Nazis.
Vertige métaphysique qui soutient la tension psychologique du livre. Le goût de la viande questionne
notre rapport à la mort, à ce qui nous fait homme, à cette animalité qui demeure en nous et peut soutenir le
désir de vie quitte à nous verser dans l'horreur absolue.