Le prince d'albanie - un aventurier au siècle des lumières

Des grands aventuriers du XVIIIe siècle européen, le prétendu "prince d'Albanie" est certes le plus jeune et le moins connu. Né en Albanie vénitienne, aux confins du Monténégro, Stiépan Zannovich a voulu réaliser par l'intelligence et par la ruse les ambitions frustrées d'une jeunesse obscure. D'emblée, il écrit à Voltaire et à Rousseau sur le ton d'un penseur, mais il s'associe ensuite à son frère aîné dans une audacieuse escroquerie aux dépens de négociants hollandais: sombre affaire qui a failli provoquer une guerre navale entre la Sérénissime et la Hollande. Selon Casanova, Stiépan et Primislav se seraient partagés l'Europe comme terrain de chasse. Après avoir vainement tenté sa chance en Saxe, Stiépan rêve de faire carrière à Potsdam, où il sera l'ami très cher du neveu de Frédéric II, le prince royal Frédéric-Guillaume, dont il se réclamera toujours avec insistance. Discrètement expulsé par le grand Frédéric, il se rend en Pologne, où il soutiendra - appuyé par ses belles amies - les ambitions politiques du comte Oginski contre le roi Stanislas-Auguste. Errant sous des pseudonymes divers en Europe du Nord, il se retrouvera l'hôte du prince de Ligne à Beloeil. Il a conçu dans l'intervalle le projet d'une fourniture de soldats monténégrins, à l'Autriche d'abord, aux Etats Généraux de Hollande ensuite: imprudence qui va le livrer à la justice néerlandaise et à la prison, où il préférera le suicide à la honte. Cette étonnante carrière, qui s'achève à 35 ans, est ponctuée par une série d'œuvres littéraires où se mêlent poésie italienne et prose française, réflexions morales et débats politiques, ainsi que des analyses psychologiques d'une remarquable pénétration. A ce titre, Stiépan Zannovich a droit à une place dans l'histoire internationale de la littérature française.