
Résumé
"Suivez cette étoile qui marche sur les traces de John le Carré et Philip Kerr." The Irish Times
Après avoir été pendant des années en poste à Madrid, l'inspecteur principal Falcón est chargé de la section criminelle à Séville. Se remettant mal de la rupture d'avec sa femme, Falcón frise la dépression nerveuse. L'affaire qu'il doit à présent résoudre va le mener aux confins de la folie.C'est la Semaine sainte à Séville, l'époque des innombrables processions. C'est alors que Raúl Jiménez est retrouvé dans son appartement, ligoté, bâillonné, les paupières découpées, devant une télévision allumée. Son visage déformé par l'horreur hante l'inspecteur. Quelles images insupportables a-t-on imposées à la victime? Et pourquoi Falcón est-il si bouleversé? Pourquoi est-il en proie à d'effrayants cauchemars, des trous de mémoire, des évanouissements? Tandis qu'il s'enfonce dans le passé tortueux de la victime, Falcón se met à lire le journal intime de son père, peintre célèbre mort depuis peu. Il découvre alors que de sordides ramifications, faites de trahisons, de vols et d'assassinats liaient Jiménez et son père. Des ramifications qui le mènent au Maroc, juste avant l'Indépendance, à l'époque du marché noir et des trafics. À l'époque où le père de Falcón devient célèbre grâce à quatre splendides tableaux de nus. Tableaux uniques, qui ne ressemblent en rien à ce qu'il peint par la suite.Falcón découvre alors que son père était un fasciste de la pire espèce, enrôlé dans la Légion étrangère de Franco, puis dans la Division Bleue aux côtés des SS, à Séville. Pendant ce temps, deux autres personnes sont retrouvées assassinées. Elles aussi, ligotées, bâillonnées, leurs yeux aux paupières découpées rivés sur une télévision où ne subsistent plus rien des visions infernales qui les ont tuées. Falcón comprend alors qu'il n'atteindra le serial killer que s'il exhume les secrets sanglants de son passé. C'est une plongée en enfer qui le guette, un enfer qui touche chaque membre de sa famille, chacun de ses souvenirs d'enfance, son amour et son admiration pour son père. Une plongée en enfer qui fera sortir l'assassin de sa tanière.
Sommaire
La première manifestation s'était produite au moment où il était entré dans la pièce et avait vu le visage. Il avait reçu l'appel à huit heures et quart du matin, alors qu'il s'apprêtait à partir de chez lui: un cadavre, probablement un meurtre, et l'adresse. La "Semana Santa" battait son plein. Quoi de plus normal qu'il se produise au moins un meurtre pendant cette période-là? Ce n'était pas ça qui affecterait les foules qui suivaient chaque jour les processions des Vierges en route vers la cathédrale, juchées sur leurs chars bringuebalants. Il avait franchi adroitement le portail de l'immense maison qui avait appartenu à son père et débouché sur la calle Bailén. Ses pneus avaient crissé sur les pavés des rues étroites et désertes. La ville, peu disposée au réveil en aucune saison, était particulièrement silencieuse à cette heure du jour, pendant la Semaine sainte. Sur la place du Museo de Bellas Artes, les maisons blanches aux encadrements ocre se terraient dans le silence derrière les hauts palmiers et les deux immenses caoutchoucs. Les grands jacarandas n'étaient toujours pas en fleur. Il avait ouvert sa fenêtre et laissé entrer l'air du matin, encore frais de la rosée nocturne. Il avait descendu la rue menant au Guadalquivir, puis emprunté le cours planté d'arbres, parallèle au paseo de Cristóbal Colón. Laissant la Vieille Ville derrière lui, il avait traversé le fleuve au-dessus duquel planait encore de la brume, dans le tôt soleil du matin. Arrivé plaza de Cuba, il avait abandonné l'itinéraire qu'il suivait d'habitude pour se rendre au bureau, et pris la calle Asunción. Plus tard, il s'efforcerait de retrouver cette sensation de plénitude, parce qu'elle aurait correspondu à l'un de ses derniers moments de bonheur dans une vie qu'il avait crue jusque-là pleinement satisfaisante. Le "juez de guardia", c'est-à-dire le juge d'astreinte aujourd'hui, l'attendait au sixième étage de l'"edificio Presidente", dans la grandiose entrée en marbre blanc de l'appartement vaste et luxueux de la victime, un certain Raúl Jiménez. Un type jeune et récemment nommé à son poste, que ce juge d'instruction, et qui avait bien tenté de le prévenir, il s'en souvenait parfaitement. Il avait dit exactement:–; Préparez-vous, inspector jefe.Et, lui, l'inspecteur principal Javier Falcón, il avait répondu:–; À quoi?Dans le silence embarrassé qui avait suivi, il s'était plongé dans l'étude attentive de plusieurs petits détails sur le costume du magistrat et en était venu à la conclusion que c'était l'oeuvre d'un couturier italien ou bien d'un grand nom de la mode espagnole –; Adolfo Domínguez, peut-être. Quoi qu'il en soit, un costume cher pour un juge de trente-six ans, comme cet Esteban Calderón qui avait à peine une année d'ancienneté.Devant l'absence de réaction de son interlocuteur, Calderón avait craint de paraître naïf. Cela devait faire plus de vingt ans que ce chef du Grupo de Homicidios de Sevilla de quarante-cinq ans passait son temps avec des gens assassinés. Il avait fait Barcelone, Saragosse et Madrid, avant d'être muté à Séville. Et c'est en haussant nerveusement une épaule qu'il avait répondu:–; Vous verrez.–; Je peux commencer, alors? avait demandé Falcón.N'ayant encore jamais travaillé en collaboration avec ce juge, il avait préféré respecter la procédure. Calderón avait hoché la tête et ajouté que la Policía Científica venait tout juste d'être autorisée à pénétrer dans l'immeuble. L'inspecteur pouvait donc entamer son examen préliminaire des lieux. Tout en longeant le couloir qui partait de l'entrée et menait au bureau de Raúl Jiménez, Falcón s'était répété de se préparer au spectacle, sans bien savoir comment on s'y prenait. Arrivé au salon, il s'était arrêté sur le seuil : la pièce était complètement vide. Perplexe, il avait jeté un coup d'oeil à Calderón. Celui-ci, de dos, dictait quelque chose à la "secretaria del juez" sous le regard attentif du "médico" Forense. Falcón avait donc continué vers la salle à manger. Vide de meubles,elle aussi. –; Ils déménageaient? avait-il lancé. –; "Claro', inspector jefe, avait répondu Calderón. Les seules choses qui restent sont un lit dans une des chambres d'enfants et tout le mobilier du bureau de Sr Jiménez. –; Ce qui veut dire que Sra Jiménez et ses enfants ont déjà emménagé dans la nouvelle maison? –; On n'en est pas certain. –; Mon adjoint, l'inspecteur Ramírez, doit arriver d'un instant à l'autre. Envoyez-le moi directement."Falcón avait poursuivi son chemin le long du couloir, prenant soudain conscience de l'écho de ses pas sur le parquet ciré, dans cet appartement vide. Il avançait, les yeux fixés sur un crochet planté dans le mur du fond au-dessus d'un carré plus clair, laissé par un tableau ou un miroir. En marchant, il avait introduit ses mains dans des gants en caoutchouc, en avait rabattu le haut sur ses poignets et, tout en faisant jouer ses doigts, il était entré dans le bureau. Là, relevant les yeux du latex blafard qui recouvrait ses mains, il avait reçu de plein fouet l'atroce regard de Raúl Jiménez braqué sur lui. C'est alors que tout avait commencé. Oh, il n'avait pas eu besoin de s'accorder une minute de réflexion pour comprendre que cet instant était un tournant dans sa vie.Les différences dans la chimie du corps ont une façon particulière de se manifester en chacun d'entre nous. Pour Falcón, ce ne fut nullement un changement subtil : de la sueur inonda l'intérieur de ses gants et se répandit sur son front juste à la racine des cheveux. Son coeur se mit à crépiter avec une intensité telle qu'il ne fut plus en état de faire un geste. Subitement, l'air lui devint difficile à respirer et il dut rester plusieurs secondes à se pincer la gorge en haletant pour en faciliter l'entrée dans ses poumons. Tout son corps lui criait: "Attention, danger!", alors que son esprit s'obstinait à dire que tout allait bien. Son cerveau, comme toujours, enregistrait la situation en toute impartialité: Raúl Jiménez était pieds nus, les chevilles solidement attachées aux barreaux de la chaise. Des meubles avaient sans aucun doute été déplacés, car leur position actuelle ne correspondait pas à l'ordonnancement de la pièce. Des marques sur le tapis –; persan et de prix –; indiquaient l'endroit où le fauteuil se trouvait d'habitude, et le câble de la télévision-magnétoscope, tendu au maximum, montrait bien qu'elle avait été bougée de plusieurs mètres par rapport à sa place normale, près de la prise murale dans un coin du bureau. Un tampon taché de salive et de sang traînait par terre. Vu de loin, ça ressemblait à des chaussettes roulées en boule. Les fenêtres à double vitrage étaient fermées, les rideaux ouverts. Sur la table, un grand cendrier en albâtre débordait de mégots. Les filtres, sectionnés, étaient entiers et neufs. À côté, il y avait le paquet: des Celtas. Des cigarettes pas chères. Les moins chères du marché. Du tabac au rabais, alors que ce Raúl Jiménez possédait quatre des restaurants les plus courus de Séville et, aussi, deux autres sur la côte, le premier à Sanlúcar de Barrameda, le second à Puerto Santa María. Du second choix et c'est tout, pour cet homme qui habitait à Los Remedios dans un appartement avec vue sur la place de la Feria valant au bas mot ses quatre-vingt-dix millions de pesettes. Un appartement avec cabinet de travail, où trônait un bureau au plateau incrusté de cuir et où une flopée de gens célèbres s'étalait sur le mur derrière, immortalisés en compagnie du maître des lieux: Raúl et El Cordobés, le torero. Raúl et Ana Rosa Quintana, la présentatrice de télé. Raúl entre Antonio Banderas et Melanie Griffith, derrière un "jamón" –; à coup sûr un "Pata Negra" extra. Un Raúl enchanté et qui brandissait avec fougue un couteau à découper, alors que l'actrice était incapable de masquer le dégoût que lui inspirait le sabot fendu pointé sur son sein droit.La suée de Falcón ne s'était pas arrêtée. Elle s'était au contraire propagée à sa lèvre supérieure et à son dos. Il sentait les gouttes dégouliner de son aisselle jusqu'à sa taille. Et la chaleur de la pièce n'y était pour rien, contrairement à ce qu'il essayait de se faire croire. Pas plus que le café bu ce matin, et cela pour la bonne raison qu'il n'en avait pas bu. Non, ça venait du visage. Un visage qui avait une sacrée présence pour être le visage d'un mort. Comme les saints du Greco dont les yeux ne vous quittent jamais. Ces yeux-là le suivaient-ils ?
Caractéristiques techniques
PAPIER | |
Éditeur(s) | Robert Laffont |
Auteur(s) | Robert Wilson |
Collection | Best-sellers |
Parution | 10/11/2004 |
Nb. de pages | 509 |
Format | 15.4 x 24.2 |
Couverture | Broché |
Poids | 624g |
EAN13 | 9782221100677 |
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