Rosebud

Rosebud est le récit d'une quête, celle de Jeanne, fascinée par le mystère du film d'Orson Welles, Citizen Kane. Elle décide elle aussi de remonter dans le passé de ses proches pour interroger leurs silences. Celui d'Antoine et des mots qu'il ne prononce plus. Celui de Claudine et des mots autrefois tus. Celui de la connivence tacite qu'elle entretenait avec Étienne. Ceux de son père et de sa mère, aussi. C'est surtout le silence et le secret de sa propre vie que Jeanne interroge ainsi. À une époque où la parole et les mots, libérés, ont tendance à devenir assourdissants et envahissants, Rosebud plaide en creux pour un sage partage entre parole et silence. Car il y a tant de paroles qui parlent faux et de silences qui parlent vrai. Ensemble de récits qui se croisent et se complètent à travers Jeanne, témoin des autres personnages, Rosebud parle d'une quête qui traverse les silences et les mots. Mots qui planent au-dessus de nos têtes, mots tus, mots gardés jalousement pour soi... La parole a-t-elle réellement le pouvoir de nous libérer ? Les récits s'entrelacent et dessinent les traits d'un personnage, Jeanne, tiraillé entre les vestiges du passé, la versatilité du présent et l'imminence d'un futur déclinant. Elle évolue sous nos yeux, enfant puis adolescente pour enfin s'adresser à nous, au crépuscule de sa vie. La mort est donc elle aussi omniprésente, elle fait partie de la vie après tout. Dialogue avec les morts, réflexion sur les mots, la mémoire, ainsi que sur la tendresse originelle, ultime rempart contre la mort - Rosebud est tout cela à la fois. L'homme est Mémorial, dit Jeanne. En tout cas, il nous sera difficile d'oublier ce deuxième ouvrage de Francia Godet. Car elle renouvelle dans Rosebud les thèmes qui lui sont chers, faisant ainsi écho à son premier roman, et nous prouve l'incroyable savoir-faire d'un auteur qui n'a de cesse de se questionner.