Sentiment des citoyens - déclaration relative à m. le pasteur vernes

La présente édition réunit pour la première fois deux textes pourtant inséparables, les flèches assassines de Voltaire et le long plaidoyer de Rousseau. L'homme de Ferney lance anonymement en décembre 1764, un pamphlet vengeur où il prétend révéler aux Genevois les ignominies de leur ancien concitoyen. D'emblée, Rousseau l'attribue au pasteur Vernes et s'obstine à ne pas y voir la griffe de Voltaire. Il s'ensuit une querelle entre Jean-Jacques et le Pasteur de Genève, qui permet à Voltaire de se frotter les mains d'avoir si bien agité le «tripot de Calvin». Pour justifier ces accusations, Rousseau rédigera en avril 1765 un mémoire qu'il renoncera à publier de son vivant, sous l'influence de ses amis Neuchâtelois. Mais, comme il y fait allusion dans ses Confessions, il faudra bien que le fidèle Du Peyrou se charge de l'éditer en 1791. Ces deux textes peuvent être regardés comme des révélateurs idéologiques de chacun des auteurs. D'une part, emporté par sa rage d'«écraser l'infâme», Voltaire lâche tous les poisons mensongers pour assouvir sa vengeance d'avoir été accusé d'être l'auteur du Sermon des cinquante. Peu importe la vérité, pourvu que la cible soit atteinte. Rousseau, lui, se débat dans ses convictions pour prouver la vérité de son innocence : tout cela se passe au moment où une menace d'excommunication pèse sur ses épaules et où il rédige les premiers Livres de son autobiographie. Cette édition veut faire le point sur l'attribution, parfois contestée, du Sentiment des citoyens à Voltaire et procurer au public un texte méconnu de Rousseau, qu'on ne trouve plus édité depuis la fin du XIXe siècle.