La douceur est un combat - discours sur une nouvelle puissance politique

Il n'y a pas de meilleur moment pour la douceur que quand la violence étend un voile spectral sur notre avenir. La douceur est le refus de la violence sociale qui humilie toujours les mêmes, casse le dos des humbles, use les vies des pauvres. Évoquer la douceur c'est vouloir subvertir l'ordre social en y inversant la hiérarchie des normes : ce qui était jugé subalterne devient cardinal, celles et ceux qu'on laissait pour compte deviennent prioritaires. La douceur est l'art d'aborder les êtres et les choses par le biais de leur fragilité. Ce renversement de perspective est politique et perturbe les dominants, ceux qui ont fait de la force, symbolique ou physique, la clef de leur statut. Car vouloir rétablir de la douceur dans le monde, c'est affirmer enfin que les derniers seront les premiers : la douceur délaisse les premiers de cordée et accorde sa sollicitude aux plus humbles. Nous les vulnérables, nous les sensibles, nous les humiliées, les silenciées, les effacées de toutes origines, et de toute la planète, nous disons que la douceur érigée en projet politique, est pour nous une puissance de libération. A la force de la violence nous opposons la puissance de la douceur.
La douceur est l'amour mis en actes, le consentement établi en règle d'or, le respect érigé en pilier des rapports sociaux et intimes. La douceur est la caresse sur la joue d'un enfant, le soutien qu'on apporte aux anciens dont la mémoire est en fuite, l'attention que l'on porte à la condition animale, aux arbres qu'on abat, aux océans qu'on pollue. La douceur est le mouvement de l'âme qui nous rend plus humain et le mouvement du corps qui nous rend plus sensible à autrui.
Pétri d'écologie et de justice sociale, "La douceur est un combat" est un texte de philosophie politique court et incisif. Il appelle à penser une politique de la douceur, qui , loin d'être une capitulation devant le chaos du monde, est une exhortation à le transformer pour préserver le vivant et refonder le lien social sur des bases plus justes.