Patients, si vous saviez - Christian Lehmann - Librairie Eyrolles

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Librairie Eyrolles - Paris 5e
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Patients, si vous saviez

Patients, si vous saviez

Confessions d'un médecin généraliste

Christian Lehmann

300 pages, parution le 20/03/2003

Résumé

À travers vingt-quatre heures chrono de la vie d'un médecin généraliste, Christian Lehmann nous dévoile l'envers d'un monde que nous connaissons mal.

"Généralistes, infirmières, patients, nous sommes la variable humaine compressible d'un système devenu fou, qui privilégie la technologie sur les hommes."

"Je veux croire qu'il est encore temps d'explorer une autre voie. C'est ce que je me dis, chaque matin, depuis des années, en route vers mon cabinet. Ça commence aujourd'hui. Ça commence aujourd'hui avec les quinze, vingt, vingt-cinq personnes qui vont venir me consulter. Sortir de la course à l'acte, prendre le temps de parler, d'informer. Et je sais que nous sommes nombreux, très nombreux à tenter d'oeuvrer en ce sens, quand bien même la lourdeur des contraintes administratives, la présence pesante de l'industrie pharmaceutique, ainsi que le mépris dans lequel nous tiennent de manière plus ou moins voilée les pouvoirs publics ne nous facilitent pas la tâche..."

Cri d'amour d'un médecin pour son métier, coup de gueule contre l'inconséquence des politiques, charge accablante - et incroyablement documentée - contre les pratiques de "Big Pharma", Patients, si vous saviez..." est tout cela - et même plus : un livre nécessaire.

L'auteur - Christian Lehmann

Christian Lehmann est né en 1958. Médecin généraliste en région parisienne, il a publié son premier roman, La Folie Kennaway, en 1988. Ont suivi une dizaine de romans, dont La Tribu, fondé sur son expérience en service de réanimation cardiaque, No pasarán, le jeu, un roman pour adolescents édité dans le monde entier, et plus récemment Une éducation anglaise, un roman autobiographique sur son adolescence.

Autres livres de Christian Lehmann

Sommaire

"C'est Melissa. C'est à cause de Melissa. Elle a encore fait dans son pantalon."Elle halète, les mots ne sortent pas."J'ai voulu... J'ai voulu la punir..."Elle fait un son, maintenant, elle fait un son avec sa bouche, une sorte de hurlement à l'intérieur d'elle, une plainte étouffée qui me glace."Qu'est-ce qui s'est passé, Clara?"Je n'ai pas dit "qu'avez-vous fait?", quand bien même ces mots me brûlent la gorge. Non, j'ai dit "qu'est-ce qui s'est passé?", pour rester neutre, pour ne pas la braquer, pour que ce qui hurle à l'intérieur d'elle ose sortir la tête. Parfois, il est difficile de ne pas croire à l'existence du Mal."J'ai... voulu... la... punir... Je... c'était... la... troisième... fois... rien qu'aujourd'hui... Alors j'ai... mis de l'eau... de l'eau très chaude... dans la baignoire..."Je ne saurais pas décrire avec précision ce que je ressens à cet instant.Comment dire? Une faille s'est ouverte. L'instant d'avant, j'étais dans un monde que par naïveté et pour aller vite nous qualifions de "normal". Un monde où ces choses n'arrivent pas, enfin pas sciemment, volontairement. Un monde où l'horreur ne survient que par accident. De l'autre côté de la faille... c'est comme si les couleurs avaient disparu, je ne les distingue plus, je suis passé dans un monde en noir et blanc, comme dans un vieux téléviseur. Je pense que je ne distingue plus les couleurs parce que c'est brutalement devenu accessoire, absolument anecdotique, et que toute mon attention est concentrée sur cette voix au téléphone, sur ce qu'elle confesse maintenant. Ou peut-être simplement parce que les cauchemars sont en noir et blanc.Je sens mes gencives, je sens ma mâchoire, qui fait un effort pour ne pas trembler. Ma nuque est raide, je suis incapable de bouger de mon siège."Amenez-moi Melissa, amenez-la-moi tout de suite."Elle n'habite pas loin. Ça me donne le temps de me préparer, de faire le nécessaire. Je demande où travaille son mari, elle me donne le nom du magasin, une grande surface de la région, et recommence à pleurer: "Vous n'allez pas lui dire... vous n'allez pas lui dire... comment je vais faire...– Amenez-moi Melissa tout de suite. Je m'occupe de tout le reste. Amenez-la-moi, c'est tout."Je raccroche, il faut bien que je me lève, mes jambes sont en plomb, rien dans la pièce n'est plus pareil. Tout me semble sordide, mesquin, étroit. Et c'est juste le commencement.Je pénètre dans la salle de bains, dans laquelle j'entasse habituellement les cartons de rouleaux de draps d'examen, que je vire sur le côté. Je rince la baignoire que je n'utilise jamais. Je vérifie le fonctionnement de la poire de douche, puis j'ouvre les fenêtres de la salle d'attente pour aérer. J'ai l'impression de puer la transpiration.Je retourne dans le cabinet, je tire deux mètres de drap sur le divan, vérifie mes instruments, le matériel de perfusion, au cas où. Je déniche un flacon de savon antiseptique dont la date de péremption n'est pas dépassée. J'appelle le 15, je demande à parler au régulateur, lui fais part en quelques mots de la situation. Toutes ses équipes sont en déplacement, mais il prend mes coordonnées. Il me rappelle dans les cinq minutes, le temps que je puisse lui passer un bilan préliminaire. J'arrache la moitié de l'annuaire en cherchant le numéro de téléphone du magasin de bricolage où travaille le mari de Clara. On me trimballe d'un poste à l'autre, m'assurant mollement qu'il n'y a personne de ce nom-là dans la boîte, jusqu'à ce que je me mette à hurler et que soudain quelqu'un au bout du fil ait une illumination. Ils me passent l'entrepôt, j'ai enfin le père de Melissa au bout du fil. Je lui demande de s'asseoir. Puis je lui annonce, sans avoir le temps de prendre des gants, qu'il y a eu à la maison un accident domestique, et qu'il doit venir nous rejoindre au cabinet. La sonnette me propulse vers la porte d'entrée, j'ouvre, Clara entre, tenant sa fille dans ses bras. Je la précède, lui demande de poser Melissa sur le divan. Les yeux de l'enfant sont grands ouverts, elle ne dit rien, son visage est couvert de sueur. Clara l'a rhabillée avec un tee-shirt, enveloppée dans une serviette, que je soulève délicatement pour avoir un aperçu des dégâts. Je suis servi. J'ausculte rapidement Melissa, vérifie sa tension. Elle n'est pas en état de choc, sa respiration est à peu près normale. Je la prends dans mes bras, elle gémit, je la porte jusqu'à la salle de bains. "Qu'est-ce que vous faites? Qu'est-ce que vous faites? Qu'est-ce qui va se passer?" Je ne réponds à aucune des questions de sa mère, je ne peux pas, pas sur le moment. J'ai déposé Melissa dans la baignoire dont j'ai retiré la bonde, j'ouvre le robinet d'eau froide, asperge les lésions avec le flexible de douche. Règle des 15 : de l'eau à 15 degrés, pendant 15 minutes, à 15 centimètres des lésions... Le Samu rappelle, le cordon du téléphone est trop court, je laisse Melissa seule dans la baignoire quelques instants, sa mère fait mine de se lever mais mon regard, que je ne maîtrise pas, la cloue sur sa chaise. Je passe mon premier bilan: "Une fillette de cinq ans et demi, sans antécédent particulier, brûlée au deuxième degré au minimum, peut-être au troisième degré par endroits, sur trente pour cent de la surface du corps: pieds, jambes, cuisses, organes génitaux, fesses... non non, de l'eau bouillante, enfin très chaude... je sais, je sais qu'elle a dû avoir le réflexe, mais sa mère l'a maintenue de force pendant trente secondes... De force, je te dis... Oui, je sais ce que ça signifie, trente pour cent... je l'ai mise sous la douche, il faut que j'y retourne. Non, tension correcte pour l'instant. Les bras sont indemnes, ils pourront la perfuser. Tu as bien l'adresse? Je les attends. Je te remercie. Oui, je préviendrai le procureur..."Je raccroche, un instant mon regard croise celui de la mère. Elle souffre, c'est évident. Il faudrait probablement lui parler, trouver les mots. Je retourne dans la salle de bains, continue à baigner d'eau fraîche la peau cartonnée, qui par endroits se boursoufle de cloques. Je murmure des choses banales, des choses qu'on dit à ses propres enfants pour les rassurer la nuit.La sonnette retentit, j'ouvre, et en l'espace de quelques secondes le cabinet est envahi de blouses blanches: les cow-boys du Samu, que je n'ai jamais été si heureux de voir débarquer dans mon trois pièces cuisine, accompagnés d'une demi-douzaine de pompiers et d'ambulanciers. Et le père de Melissa, qui doit vivre un cauchemar éveillé, et à qui je tente de donner quelques explications aussi peu alarmistes que possible sur l'état de sa fille unique qu'un hélicoptère va venir chercher sur le parking de l'hôpital le plus proche pour la transférer d'urgence vers un service de grands brûlés à l'est de Paris. Et puis je me retrouve seul dans le cabinet désert. Fenêtres ouvertes sur l'été. Quelques traces d'eau et de bottes sur la moquette, qui s'estomperont bientôt. Et comme la prochaine rhinopharyngite, le prochain renouvellement d'antihypertenseur n'est pas prévu avant une bonne heure, j'ai le temps de m'asseoir à mon bureau et de relire lentement le chapitre sur les brûlures. Les chances de survie de Melissa y sont analysées, son pronostic établi en fonction de divers critères de gravité, dont l'étendue des brûlures, leur profondeur, leur topographie...


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Caractéristiques techniques

  PAPIER
Éditeur(s) Robert Laffont
Auteur(s) Christian Lehmann
Parution 20/03/2003
Nb. de pages 300
Format 16 x 24
Couverture Broché
Poids 455g
Intérieur Noir et Blanc
EAN13 9782221098004
ISBN13 978-2-221-09800-4

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